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Les
diagnostics difficiles à l'épaule Mise
à jour: 11/02
L'essentiel:
-Epaule douloureuse simple: le traitement physique est essentiel. Mobilisation
de l'espace sous-acromial et éviction du conflit tendineux dans les activités
de la vie courante. AINS et infiltrations en soutien, dans les formes les plus
pénibles.
-Epaule aiguë calcique: immobilisation et AINS et/ou infiltration. Spectaculaire
mais d'amélioration spontanée. Les migrations calciques peuvent
être moins aiguës, donnant un tableau douloureux s'étalant
sur plusieurs mois (bursite sous-acromiale chronique).
-Epaule gelée: tous les axes de l'épaule sont progressivement
enraidis. La mobilisation est facile jusqu'à la mise en tension de la
capsule, tandis que tout geste brusque déclenche des douleurs vives.
Infiltrations intra-articulaires à la phase chaude, rééducation
à la phase froide.
-Epaule pseudo-paralytique: mobilisation passive facile mais abduction active
impossible, déclenche une élévation du moignon de l'épaule
plutôt que du bras.
-Névralgie du sus-scapulaire: y penser chez un sportif ou chez un professionnel
ayant des mouvements répétitifs bras en élévation.
-Névralgie cervico-brachiale: trajet radiculaire, intrication fréquente
avec une tendinopathie.
-Syndrome de Parsonage et Turner: très rare, douleurs intenses de l'épaule
avec installation d'une amyotrophie majeure.
-Omarthrose et néo-articulation sous-acromiale: évitez l'utilisation
de l'épaule en articulation portante chez vos personnes âgées.
-Arthrose acromio-claviculaire: traumatismes et travaux de force.
-Epaule instable du jeune sportif: l'examen de choix est l'arthroscanner.
-Pseudo-polyarthrite rhizomélique: y penser après 50 ans quand
les douleurs sont diffuses et permanentes aux 2 épaules. VS - CRP font
la différence avec les pathologies dégénératives.
-Formes intriquées: la gestuelle perturbée de l'épaule
entraîne des contraintes anormales sur la charnière cervico-dorsale,
les douleurs du rachis irradient à l'épaule. Faire cliniquement
la part des choses est essentiel, les examens complémentaires étant
peu secourables dans ce contexte.
Revoyons les 4 tableaux classiques:
1) L'épaule douloureuse simple:
Erosion tendineuse localisée, douleur réveillée par la
mobilisation d'un ou deux axes de l'épaule, le plus souvent l'abduction
bras en rotation interne (paume tournée vers le bas) traduisant une lésion
du supra-épineux (sus-épineux).
La pathogénie fait intervenir le conflit sous-acromial (traumatisme ou
plus souvent microtraumatismes) et une hypovascularisation de la jonction tiers
externe/ tiers moyen de la coiffe des rotateurs.
Le pronostic est bon si le déclenchement s'est fait par un traumatisme
(chute sur le coude plutôt que l'épaule) ou une activité
inhabituelle avec le bras en élévation. Une évolution plus
chronique ou des récidives sont à craindre quand le déclenchement
semble professionnel, sportif, ou en l'absence de cause évidente.
Les AINS ne sont pas un bon traitement de la tendinite simple: ils ne font que
masquer la douleur et n'incitent pas le patient à modifier sa gestuelle.
Ils devraient être réservés au passage des moments difficiles,
par exemple avec une prise au coucher en cas de douleurs insomniantes.
Bien que l'infiltration aie souvent des résultats spectaculaires, elle
devrait être réservée aux échecs des traitements
physiques bien conduits, et hors d'un contexte d'entretien par un geste professionnel
ou sportif.
Le traitement physique est essentiel, malheureusement difficile à obtenir
en pratique chez nos kinés peu motivés par des AMM étriquées
et dont la formation est parfois obsolète. Le but est d'obtenir une mobilisation
de l'espace sous-acromial, pour faciliter la microcirculation locale, sans déclencher
le conflit sur le tendon. Il faut donc bien repérer, à froid,
les secteurs de mouvement à éviter, et reprogrammer les gestes
de la vie courante en fonction de ces passages interdits. Une gymnastique sera
apprise au patient, incluant des étirements passifs de la gléno-humérale
(et au passage du rachis cervical) et des mouvements de brasse ou d'action de
ramer, épaule basse. Ces exercices peuvent être testés sur
un rameur d'appartement ou dans une piscine afin d'être pratiqués
quotidiennement. Il faut prévenir le patient que la douleur sera réveillée
initialement, mais qu'elle va s'atténuer en insistant. Il devra vous
reconsulter si les choses ne font qu'empirer, ce qui fait suspecter davantage
qu'une tendinite simple: déchirure tendineuse ou enthésopathie
d'insertion du supra-épineux. Vous pratiquerez alors, avant l'IRM, une
radiographie simple de face, bras en rotation interne et externe, pour éliminer
une calcification de la coiffe: c'est une douleur de bon pronostic qui correspond
à la désagrégation spontanée (qui peut s'étaler
sur plusieurs mois) du dépôt calcique. Ce n'est pas à mon
sens une contre-indication à poursuivre les exercices, mais l'on pourra
s'aider plus volontiers des AINS ou d'une infiltration.
2) L'épaule aiguë hyperalgique:
Migration calcique. C'est le tableau le plus simple à gérer, malgré
le contexte théatral de la douleur violente. Vérifiez bien le
diagnostic: le patient ne vous laisse pas du tout ou quasiment pas mobiliser
son bras. Il a l'attitude d'un traumatisé de l'épaule (mais il
n'y a eu aucun choc, par contre souvent un travail répétitif bras
en l'air qui a agressé la calcification). En comparaison, dans la capsulite,
un secteur de mouvement est toujours possible tant qu'on ne met pas la capsule
en tension, et dans la rupture tendineuse, la mobilisation passive douce ne
pose pas trop de problèmes.
Vos AINS et antalgiques sont efficaces. Mais conseillez surtout la mise au repos
le bras en écharpe. En même temps, il est souhaitable que le patient
mobilise son bras par intermittence, de plus en plus souvent et sur un secteur
plus large au fur et à mesure de l'amélioration. Cela améliore
le drainage sous-acromial et raccourcit l'évolution. L'infiltration est
très efficace pour les plus pressés, mais pas indispensable. L'application
intermittente d'un cryopack, ou d'un pansement alcoolisé pour la nuit
sont des traitements d'appoint très utiles, limitant la consommation
d'antalgiques.
Vous confirmerez le diagnostic par une radio (bras en rotation indifférente,
interne et externe). Attention, l'éclatement d'une calcification molle
peut la rendre nuageuse et peu visible. Rassurez le patient en lui expliquant
que cette crise violente va nettoyer la calcification et qu'il a de bonnes chances
d'être complètement tranquille par la suite. Une rééducation
à distance (1 mois) est conseillée s'il y a eu des douleurs plus
vagues et très antérieures à la crise, traduisant un conflit
sous-acromial ancien.
3) L'épaule gelée:
L'élément essentiel pour reconnaître une capsulite est la
raideur douloureuse dans tous les axes de mouvement, alors qu'on trouve toujours
des passages libres dans une tendinite même évoluée. Vous
sentez une tension au déclenchement de la douleur, qui n'est pas une
contraction protectrice du patient: même s'il vous laissait faire, vous
ne pourriez pas aller plus loin. C'est un blocage un peu souple, différent
de celui d'une luxation. Autres éléments importants: la douleur
est permanente (aggravée par tous les mouvements amples), typiquement
la patient vous dit méchamment dérouiller s'il fait un geste brusque
(mise en tension brutale et inopinée de la capsule); les AINS sont peu
ou pas efficaces, les antalgiques moyens.
Sachez reconnaître la phase chaude, période de douleurs vives et
d'enraidissement croissant, de la phase froide: les douleurs sont atténuées
mais l'épaule reste gelée.
A la phase chaude, vous pouvez essayer les classiques injections de calcitonine,
efficaces 1 fois sur 3. Mais on obtient de bien meilleurs résultats avec
l'injection intra-articulaire d'un mélange de corticoïde et de lidocaïne
à 0,5%. Parlons de "remplissage" plutôt que de "distension"
articulaire, car il est illusoire de vouloir distendre une capsule serrée
avec une injection même sous pression. L'injection est réalisée
sous scopie. Le fait de baigner la capsule avec une bonne quantité d'anesthésique
dilué semble couper une sorte de court-circuit douloureux (la pathogénie
initiale de la capsulite semble être une souffrance neurologique, médullaire
ou radiculaire cervicale prolongée), et on a la surprise de ne pas voir
les douleurs revenir au même niveau à la fin de l'effet anesthésiant,
ce que n'obtient pas une injection corticoïde isolée. Vous pouvez
renouveler ce geste 1 ou 2 fois mais souvent les patients estiment avoir une
amélioration suffisante après la première.
A la phase chaude toujours, la kiné n'est pas indispensable. Thermothérapie
(applications de chaud et froid alternées) et mobilisations douces mais
régulières jusqu'à la limite de la douleur, sans insister,
sont très utiles pour éviter un enraidissement important et rapide,
mais elles peuvent être réalisées facilement par le patient
lui-même et leur répétition doit être de toute façon
beaucoup plus fréquente que lors de la seule séance du kiné.
A la phase froide, un vrai dérouillage est nécessaire. Certains
disent que la rééducation n'est pas nécessaire dans la
capsulite. C'est provocateur mais vrai pour certains patients, qui d'eux-mêmes
reprendre des activités variées, ignorer leurs douleurs, et se
dérouiller spontanément l'épaule. Cependant ce patient
doté d'une bonne proprioceptivité naturelle n'est pas le profil
habituel dans la capsulite. Nous avons plutôt affaire à des gens
nerveux, contractés, remplis d'appréhension par leurs douleurs,
qui n'ont pas su gérer les fréquentes douleurs cervicales apparues
longtemps avant la capsulite. Ce profil-là a besoin d'un bon guide, de
moments de détente, d'une ambiance rassurante, et un kiné qui
sait créer ces conditions favorables rendra de grands services. Vous
reverrez régulièrement le patient pour le renouvellement des séances
afin de vérifier qu'il ne s'agit pas d'une routine confortable et que
des progrès sont nets sur le fond. Mais le point de vue du patient est
plus important que l'amélioration chiffrée des amplitudes.
4) L'épaule pseudo-paralytique:
La mobilisation passive est normale, mais un mouvement actif, généralement
l'abduction, est impossible. La coiffe des rotateurs est rompue. C'est un tableau
de rupture brutale, ou très large, ou amyotrophique. Quand la coiffe
a laché progressivement, les mouvements contrariés restent possibles
car les autres rotateurs (pectoraux, sous-scapulaire) et le deltoïde se
sont adaptés et gardent une bonne continence gléno-humérale.
Le traitement dépend bien sûr de l'âge et des souhaits du
patient quand à retrouver une fonction normale de l'épaule. Le
traitement arthroscopique a des risques limités. Il peut réparer
la coiffe quand celle-ci n'est pas trop détériorée, ou
interposer un lambeau musculaire pour éviter la formation d'une néo-articulation
sous-acromiale douloureuse. Vous serez attentif à préserver l'autonomie
des patients côté membres inférieurs, de façon à
ce qu'ils ne soient pas obligés de s'aider souvent des bras.
Le diagnostic différentiel:
*Les névralgies de
la région de l'épaule sont le principal diagnostic
différentiel:
-névralgie du sus-scapulaire: rare, pathologie élective des sports
d'armer du bras et de lancer, le nerf est comprimé dans l'échancrure
coracoïdienne, les douleurs sont plutôt des disesthésies de
la région postérieure de l'épaule, amyotrophie supra et
infra-épineuse possible dans les formes négligées, sonnette
à l'appui sur le nerf dans l'échancrure. L'EMG confirme.
-névralgie cervico-brachiale: typiquement la radiculite a un trajet s'étendant
jusqu'aux doigts, la mobilisation de l'épaule est normale, les points
douloureux cervicaux sont francs. Les formes intriquées à une
tendinopathie sont fréquentes, nous les détaillons ci-dessous.
-syndrome de la traversée thoraco-brachiale: diagnostic rare, évoqué
plutôt devant une névralgie au bras sans cervicalgies que devant
une douleur à l'épaule.
-syndrome de Parsonage et Turner: très rare, névralgies intenses
de l'épaule s'atténuant en quelques jours tandis que s'installe
une amyotrophie majeure, atteinte neurogène à l'EMG, amélioration
spontanée en quelques mois.
*L'omarthrose est moins fréquente que la gonarthrose ou la coxathrose, mais n'est pas
rare. Comme au poignet ou au coude, c'est une arthrose secondaire, apparaissant
souvent après un décentrage ou une instabilité gléno-humérale:
rupture de coiffe ancienne, luxation ou entorse, micro-traumatismes sportifs
ou professionnels. La radio fait facilement le diagnostic. L'omarthrose isolée
est généralement bien tolérée. C'est l'association
d'une néo-articulation sous-acromiale après rupture de coiffe
qui cause un réel handicap, particulièrement chez une personne
âgée avec pathologie du rachis ou des membres inférieurs
associée qui l'oblige à s'aider beaucoup des bras, voire à
utiliser l'épaule comme articulation portante (béquilles, déambulateur).
*L'arthrose acromio-claviculaire est rarement isolée et symptomatique. La plupart du temps, devant des
lésions dégénératives de cette articulation, il
faut soupçonner une tendinopathie sous-jacente. Seuls des points douloureux
précis sur cette jointure facile à palper feront évoquer
sa responsabilité. Il existe très souvent un contexte favorisant:
antécédents traumatiques, pratique d'un sport de lancer, travail de force avec les bras en élévation. A 'examen, la douleur est réveillée non pas entre 70 et 90° d'abduction comme pour la tendinite du supra-épineux, mais en fin de geste, à partir de 110°. Le diagnostic
est confirmé par une injection d'anesthésique dans l'articulation.
*L'épaule instable: On revient chez le jeune, sportif, qui a eu un traumatisme ou des microtraumatismes
à l'épaule. Le bourrelet cartilagineux glénoïdien
est abîmé, en général sur le bord antérieur
de la glène, et une partie de la capsule est désinsérée,
provoquant des sensations d'instabilité voire des subuluxations dans
les cas sévères. A l'examen, recherchez l'appréhension
du patient lors de l'abduction/ rotation externe forcée du bras (qui
tend à provoquer la luxation), la douleur lors de la décoaptation
inférieure,
Signe de l'armé du bras: appréhension lors de la rotation externe forcée, bras en abduction.
Décoaptation inférieure: douleur et appréhension en tirant le bras collé au corps vers le bas, muscles relâchés.
et enfin la recherche d'un
tiroir antéro-postérieur: empaumez bien le moignon de l'épaule
d'une main, le haut du bras de l'autre, et imprimez des poussées vers
l'avant et l'arrière dans différents degrés d'abduction,
ce qui reproduit la douleur et l'appréhension du patient. La radio peut
montrer une érosion du rebord osseux de la glène (demandez un
profil glénoïdien), mais l'examen de choix est l'arthroscanner,
montrant les lésions chondrales pures et la désinsertion capsulaire.
*Les rhumatismes inflammatoires:
La plupart peuvent toucher l'épaule, mais une monoarthrite rhumatismale
à cet endroit est exceptionnelle. Le contexte évoque donc le diagnostic.
Le seul piège est la pseudo-polyarthrite rhizomélique (et la polyarthrite
rhumatoïde à début rhizomélique chez le sujet âgé).
La topographie est régionale, bilatérale, les masses musculaires
sont sensibles à la pression, de façon modérée et
diffuse et non avec des points-gâchette comme dans les névralgies,
l'horaire est typiquement inflammatoire, avec un dérouillage par les
activités physiques. Vous vous précipiterez sur les résultats
de la VS et/ou de la CRP. Elevés, ils vous assurent une amélioration
spectaculaire et rapide du patient par la corticothérapie.
Les formes
intriquées:
Association d'une tendinopathie et de névralgies du membre supérieur.
Il s'agit de formes vues tardivement. Soit le patient commence par une tendinopathie,
modifie sa gestuelle et finit par provoquer un surmenage relatif du rachis cervical
sur lequel est ancré cette épaule. Soit le patient a une névralgie
initiale, les douleurs projetées entraînent un comportement inadapté
et une tendinopathie se déclare secondairement à l'épaule.
Il est important d'analyser précisément avec le patient cet historique.
Même si les 2 pathologies, épaule et rachis, peuvent sembler autonomes
sur le plan évolutif, elles n'ont pas le même potentiel: la lésion
primitive peut être très difficile à contourner avec le
traitement médical (déchirure tendineuse, hernie discale), tandis
que les douleurs secondaires, liées à un trouble de fonctionnement,
disparaissent spontanément ou à l'aide d'une rééducation
proprioceptive.
La tendinopathie entraîne habituellement une névralgie à
la face externe du bras. Si la douleur va au-delà du coude, c'est plus
probablement une NCB.
Concentrez votre examen clinique sur l'épaule: la mobilisation passive
doit concerner la seule gléno-humérale: empaumez bien le moignon
de l'épaule d'une main tandis que vous mobilisez le bras de l'autre.
L'omoplate ne doit pas glisser, sinon vous exercerez des tractions sur le plexus
brachial et rendrez votre examen moins sélectif. Vous repérerez
facilement la capsulite (enraidissement dans tous les axes), la tendinite simple
(accrochage sur un axe). Les rotations seront pratiquées bras le long
du corps et bras en abduction. Bras le long du corps, elles font une simple
mise en tension des tendons rotateurs interne et externe; elles ne sont douloureuses
que dans les tendinopathies évoluées. Bras en abduction, les rotations
vers le bas et vers le haut sont plus sélectives: elles précisent
le site du conflit. Vous les ferez sur différentes positions de l'arrière
vers l'avant (photo), en expliquant au patient ce que vous cherchez. C'est en
effet surtout pour lui que cet examen détaillé est le plus utile.
Il lui permet de bien sentir que tous les axes de mouvement ne sont pas superposables
et que certains passages sont à éviter. Vous lui donnerez envie
de s'analyser, de faire des échauffements et parfois de s'améliorer
tout seul.
(1) et (2) Rotation interne et externe en abduction/rétropulsion,
(3) Rotation interne en abduction/position médiane, etc...
Si l'épaule est libre à la mobilisation passive, testez les mouvements
contrariés: impossibles, ils évoquent bien sûr une rupture
tendineuse, mais leur normalité ne l'exclue pas. Douloureux mais possibles,
ils dépistent les enthésopathies et les fissures de la face inférieure
de la coiffe. Parfois dans les cervicalgies traînantes, le seuil de la
douleur est altéré et tout ce que vous faites faire au patient
est douloureux, rendant l'intégrité de l'épaule difficile
à apprécier. Vous vous repérerez au fait que tous les axes
de mouvement entraînent des protestations uniformes, ce qui ne se voit
autrement que dans la capsulite. Celle-ci est normalement facile à individualiser,
avec sa limitation franche, sauf les formes débutantes. Si l'examen ne
vous apporte pas de conviction, n'hésitez pas à revoir la personne
2 à 3 semaines plus tard, sinon c'est un collègue qui risque fort
d'empocher un diagnostic facile! Un excellent test diagnostique est l'injection
d'anesthésique dans la bourse sous-acromiale et l'articulation gléno-humérale,
réalisé au cabinet chez les maigres, de préférence
sous scopie chez les enrobés.
Les examens complémentaires ne devraient pas venir en renfort d'un examen
clinique normal, mais de l'échec d'un traitement médical justifié
et bien conduit. Si votre examen n'est pas suffisamment contributif, il n'est
pas judicieux de repousser le problème en confiant toute la responsabilité
du diagnostic à un examen complémentaire. L'IRM ne voit même
pas bouger votre patient! Si la douleur du patient est assez récente,
attachez-vous d'emblée à cerner un contexte favorisant, en particulier
un surmenage ou une difficulté relationnelle en milieu professionnel.
Si la douleur est plus ancienne et la personne plus impatiente, il est difficile
de résister à la demande d'examen complémentaire. Mais
votre examen doit néanmoins primer, s'il est rassurant, ainsi que la
réalisation du traitement qui vous paraît le mieux adapté.
N'hésitez pas à dévider la bobine du suivi des douleurs
chroniques: examens sophistiqués -> lésions -> chirurgie?
-> complications? ou au contraire: examens -> rien -> déni du
handicap du patient... Les traitements simples retrouveront de leur aura, pour
peu que vous mettiez en place des mesures de fond, traitement physique, adaptation
des gestes de la vie courante, et pas seulement un AINS de plus. Si on n'a pas
convaincu le patient, pas la peine de s'arcbouter sur son refus d'examens complémentaires.
Ne l'envoyez pas en rééducation, vous gâchez les chances
d'un traitement essentiel mais qui nécessite une pleine coopération.
Déchargez-vous en conseillant de prendre l'avis d'un collègue.
Si nous sommes plusieurs à dire la même chose, la confiance dans
un diagnostic rassurant ne peut que remonter. Rêvons un peu: on pourrait
imaginer que la sécu nous cote un court staff hebdomadaire qui permette
de présenter et justifier nos demandes d'IRM, filtrant ainsi les auto-prescriptions
des patients et accélérant les rendez-vous pour les autres. C'eût
été moins coûteux et plus logique que d'implanter moult
machines qui vont faire exploser comme le scanner le nombre de prescriptions
ne respectant pas les bonnes pratiques.